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mardi 7 février 2012

Alexandre le Grand



Je viens de recevoir de la Bibliothèque Centrale de Prêt les deux volumes des « Chroniques de la Montagne » d’Alexandre Vialatte  parus chez Robert Laffont dans la collection « Bouquins ». Près de deux mille pages ! Un sacré morceau !

Pour ceux qui ne connaîtraient pas, quelque mots sur l’auteur : M. Vialatte, distingué germaniste traduisit Kafka en français. Ce qui est d’autant plus méritoire que l’inverse n’est pas vrai. Il écrivit quelques romans qui ne connurent qu’un succès d’estime. Ce sont ses chroniques qui lui permirent d’accéder à la postérité. Il en publia un peu partout. Les plus célèbres furent celles qui, dix-huit ans durant, parurent chaque mardi dans les colonnes du quotidien « La Montagne » de Clermont-Ferrand.

Il bénéficiait pour ce qui est du contenu, d’une liberté totale, à la seule condition de ne pas parler politique. Cette liberté, il en usa et abusa. Pour le plus grand bonheur de ses lecteurs.

Chaque chronique est précédée d’un chapeau censé en annoncer le contenu, à la manière dont les romans d’aventures  du début du siècle dernier coiffaient chaque début de chapitre d’un « sommaire ». Seulement, ce résumé est pour le moins copieux et désoriente quelque peu. Prenons-en un au hasard, celui de la Chronique 673 « LEPTOCÉPHALES ET VEAUX BRETONS » : Faut-il tuer l’homme ? * Probablement  * Raisons pour * Raisons contre* Excès des raisons pour * Merveilles du monde * Éléphants * Veaux bretons * Leptocéphales * Anguilles et serpents de mer * Plaisirs de Dieu et fraîcheur de la terre * Grandeur consécutive d’Allah. Comment résister à un tel programme ?  Il est à noter que le dernier point abordé annonce la conclusion de chacune des chroniques. Sans que rien n’y prépare elles se terminent  toutes  par « Et c’est ainsi qu’Allah est grand ».

Entre le chapeau et la sempiternelle conclusion, on parle de tout, de rien, dans un style élégant et léger. Avec une ironie et un humour absurde d’excellent aloi. Ainsi M. Vialatte commente-t-il  un passage de Vladimir Jankélévitch  :  «  « Ce mystère ne peut être rongé par le progrès scalaire de nos connaissances » Voilà la chose et là j’applaudis des deux mains. Qui a jamais vu le progrès scalaire ronger quelque mystère que ce soit ? Même derrière une malle démodée, dans un grenier de commune rurale !  J’ai vu des rats ronger des noix, des lapins ronger des carottes, du tout, du rien, du presque tout, du presque rien, et même parfois du je ne sais quoi, jamais je n’ai vu de progrès scalaire ronger de mystère de la totalité. » (Chronique du rien et du presque rien,  20 mars 1962).

Je ne sais si ces brefs aperçus seront susceptibles de donner l’envie de lire ces petits bijoux. Je l’espère cependant. Quant à moi, je n’ai qu’un regret : ne disposer de ces volumes que pour un mois alors qu’il faudrait en faire un livre de chevet dont on savoure un passage à loisir. J’ai trouvé la parade : je vais me les offrir dès qu’une de mes actions, particulièrement  méritoire, justifiera telle récompense.

3 commentaires:

  1. Les sources d'inspiration d'Alexandre Vialatte


    Vous devriez aimer. Vialatte lit sa préface aux Papiers posthumes du Pickwick Club de Dickens, qui est paraît-il très belle.

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    1. Merci Sébastien ! Le passage sur le catalogue Manufrance est hilarant. Durant ma lointaine enfance, je faisais mes délices de cet ouvrage. Quant à Dickens, il est placé bien haut dans mon panthéon littéraire...

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  2. Ah, Vialatte... Desproges lui doit tous, c'est dire si je luis dois énormément aussi :)

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