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samedi 10 novembre 2012

Streets of London (2)



La solution serait de décharger la voiture et de la garer plus loin… En la bougeant de temps à autre, on cesserait de la remarquer. Je téléphonai donc à ma copine pour savoir si des fois, elle ne pourrait pas reprendre mes affaires, provisoirement bien sûr. Bonne fille, elle accepta. Nous recommençâmes à nous fréquenter. Passer ses week-ends avec une jeune femme, bien au chaud,  ça vaut toutes les rues de Londres, même quand on n’est pas raide dingue de la dame. 

Seulement, la dame en question  croyait beaucoup en notre histoire. Elle me lut un jour une lettre de son père qui se déclarait heureux de la savoir avec un jeune homme si plein d’humour, qualité à ses yeux essentielle. Je me sentis obligé de détromper ses attentes. Question d’honnêteté. Et de connerie. Cette fille avait d’énormes qualités Il m’est arrivé plus tard de penser à elle avec des regrets mêlés de remords. Mais bon, on ne se refait pas…

Je retrouvai donc la rue, mais le printemps étant revenu, c’était moins dur.

Finalement, j’eus une illumination : depuis des mois, lorsque je téléphonais pour une annonce je m’attirais régulièrement un « Sorry, Luv, it’s already gone ». J’avais beau aller chercher le journal à l’imprimerie avant qu’il ne soit distribué, toutes les chambres étaient louées avant que j’appelle. Et si elles n’étaient pas vraiment parties ? Et si le fait que je parle avec un accent étranger décelable sans pour autant être clairement  identifiable était pour quelque chose dans ces réponses ?  Après tout, ça arrive que des gens se méfient des étrangers…

Je demandai donc à un de mes ex-colocs de téléphoner pour moi. Et là, miracle, la première annonce contactée s’avéra libre ! Prix raisonnable et proximité du boulot m’avaient fait la sélectionner. Mon copain prit immédiatement rendez-vous et le temps de passer à la banque retirer de quoi avancer le dépôt de garantie, et quelques semaines d’avance* nous arrivâmes chez le propriétaire en question. La rue était agréable, la façade pimpante.  Un homme aux cheveux blancs nous ouvrit. L’entrée était coquette, sa moquette super-épaisse. Celui que j’allais nommer Mr Fair enough à cause de sa manie de finir toute phrase par cette expression-tic, nous montra la chambre : parfaite.

Quand mon ami lui annonça que j’étais le locataire prospectif, le bonhomme se montra circonspect. Il s’en faisait pour moi : étais-je certain de pouvoir supporter le loyer ? Allais-je rester longtemps ?  N’aurais-je pas tendance à ramener des filles (ces Français !) ce qu’on ne saurait tolérer dans une maison honnête ?  Il n’avait pas sa chance.  L’argent ? Mais cher Monsieur je vous paye un mois, deux mois, tous les mois que vous voulez,  d’avance ! Rester longtemps ? Mais j’entends bien mourir ici et souhaite que Dieu me prête longue vie ! Des filles ?  Quelle idée ! Je les ai en horreur, de même que les hommes ! Les seules personnes que je supporte sont les vieux polonais (car il l’était) aux cheveux de neige ainsi que leur respectable épouse et ceci en tout bien tout honneur !  M’eût-il imposé les conditions les plus farfelues que j’y eus souscrit avec enthousiasme…  Il n’avait pas sa chance.

Nous sortîmes munis d’un contrat de location en bonne et due forme.

On apprend beaucoup de choses en voyageant.

13 commentaires:


  1. J'aime certaines tranches de vie et les voyages galères, cela change un peu des histoires touristiques insipides. Toutefois, ce qui m'épate, c'est que pour une fois, Jacques, vous ne citez pas une chanson française. Vous pouvez donc être sensible à ce folk plus ou moins pop...

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    1. Je peux ! Disons qu'à cette époque j'appréciais beaucoup la folk music qu'elle soit américaine, anglaise et surtout irlandaise. Je suis de mon époque...

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  2. Décidément j'adore vous histoires !
    Mais comme jeune mec, vous deviez être épouvantable.
    Oh, bien sûr, par pour les vieux Polonais à cheveux blancs !
    Mais enfin, comme vous dites : "On ne se refait pas !"

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    1. Épouvantable ? Mais je n'ai rien fait de mal !

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    2. Non bien sûr !
      Mais celles qui étaient amoureuses de vous, elles avaient plutôt intérêt à ne pas être trop romantiques.
      Celle-ci vous a viré vite fait. Elle a bien fait.

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    3. Elle ne m'a pas viré, c'est moi qui suis parti. Elle a même essayé de renouer ensuite.

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    4. Un de mes amis disait, en parlant des femmes, quand la mayonnaise a pris, on peut tout se permettre.

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  3. Le proverbe " Saoul comme un polonais " est il vrai ?

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    1. Sans vouloir être mauvaise langue, je dirais que ce polonais, comme beaucoup de ceux que j'ai rencontrés, aimait sa vodka. Sa femme, anglaise, m'avait dit qu'il avait toutes les qualités et un seul petit défaut, celui de boire. Il est vrai que certains soirs, il avait tendance à se battre avec les poubelles récalcitrantes qu'il tentait de sortir. Mais il gagnait toujours !

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  4. C'est tout de même rafraîchissant, un roman picaresque qui ne se déroule pas en Espagne.

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    1. Oui, c'est vrai, ça a quelque chose de picaresque, je n'y avais pas pensé. Pourtant j'ai suivi une UV sur ce genre en littérature comparée où l'on étudiait les grands Espagols (Lazarillo de Tormes, Gyzman d'Alfarache, etc.) ainsi que Gil Blas pour la France et Simplicius Simplissimus pour l'Allemagne.

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    2. Simplicius Simplicissimus, pardon !

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    3. Vous faites bien de rectifier, Jacques. On aurait pu vous le reprocher -)

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