..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

jeudi 10 juillet 2014

Vieillesse et ressemblance



Selon Gabriel García Márquez, « Lorsqu’un homme commence à ressembler à son père c’est qu’il commence à vieillir. ». Mouais… J’avais plutôt l’impression qu’on commençait à vieillir dès la conception. Quant à ressembler à son père, s’agit-il d’une ressemblance physique ou morale ? Pour ce qui est de l’apparence, on a toujours une certaine similitude qu’elle soit de traits, de morphologie générale ou d’attitudes acquises par mimétisme suite à une longue fréquentation. Nier l’existence de tout « air de famille » me paraîtrait  abusif.

Maintenant, si je me suis récemment posé cette question c’est qu’une chose m’a frappé : plus j’avance en âge, plus il m’est difficile de rester tranquille à lire, regarder un film ou une série télévisée quelconque. Il faut que je fasse quelque chose de mes mains. Ne serait-ce que comme en ce moment taper des mots sur un clavier. Ce n’était pas le cas auparavant, j’ai été un grand lecteur, j’ai aimé regarder films et séries. Progressivement ces tendances que je qualifierais de contemplatives ont cédé le pas à un goût marqué pour plus d’action. Au point que sauf exceptionnelle sortie, une journée sans activités manuelles me laisse un goût de plus en plus amer. Au point qu’il me faille m’établir un programme quotidien d’action. Si je parviens, mais c’est rarement le cas tant j’ai tendance à sous-estimer l’ampleur des tâches comme à surestimer mes capacités, à le remplir complètement j’en retire un certain bien être. Et c’est en cela que je ressemble de plus en plus à mon père.

C’était un actif. Jusqu’à un âge avancé, il  se levait très tôt afin de se livrer à de multiples bricolages. Et il faisait cela avec une énergie qui n’avait d’égale que sa maladresse et le peu de contrariété que lui causait un travail bâclé. Bricoler avec lui était une épreuve. Quand je lui donnais un coup de main, malgré la résolution que j’avais prise de ne plus jamais m’opposer à lui,  il me fallait prendre sur moi pour supporter les ravages que provoquait son manque de soin. Couper des planches sans mesurer, transformer un portail neuf en quasi-ruine lors de sa pose, installer des montages électriques aussi peu sûrs qu’abracadabrants, n’étaient que quelques uns de ses nombreux talents. Si j’ai appris quelque chose avec lui, c’est ce qu’il ne fallait pas faire. Ma manie de trouver imparfait tout ce que je peux faire lui était étrangère. Quand une imperfection était par trop flagrante, il ne consentait qu’à regret à la masquer par une réparation parfois pire que le défaut originel…

Il était totalement rétif à toute "inaction". De sa vie, il n’avait, en dehors d’ouvrages de droit d’administration communale, lu qu’un roman, La Mousson, si je me souviens bien. Il faut dire à sa décharge qu’une maladie le clouant au lit (la seule que je lui ai connue en dehors du Parkinson final), il n’avait d’autre choix. Quand je l’ai vu décliner, j’ai pensé que le jour où il se verrait incapable de faire quoi que ce soit de ses mains, il s’éteindrait bien vite. C’était bien mal connaître la vieillesse qui souvent apporte leur remède aux maux qu’elle cause. Plutôt que de déprimer et se laisser aller, il considéra que le peu qu’il pouvait encore faire était beaucoup… Heureux caractère !

S’il y a ressemblance, elle n’est donc que très partielle… Devrais-je en conclure que je n’ai que très peu commencé à vieillir ?

20 commentaires:

  1. On commence à vieillir quand ce qui était un plaisir devient une corvée.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Peut-être... Hélas, il est rare que le contraire se produise...

      Supprimer
  2. J'avais dejà pu remarquer, au travers de ce que vous écrivez, cette tendance à l'hyperactivité. Est-ce le signe que vous vieillissez bien ? Sans doute. Pour ce qui me concerne, et je suis largement votre aîné, j'incline plutôt au développement des activités contemplatives ou demandant moins d'efforts musculaires : lecture, écriture, sport "allégé", écoute ou pratique de la musique. Qui est le plus représentatif des "vieux" : vous ou moi ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Hyperactivité, n'exagérons rien... Quant à être représentatif de quoi que ce soit, il y a longtemps que j'y ai renoncé.

      Supprimer
  3. Non, vous êtes simplement plus con que lui, plus bavard, plus inutilement bavard. Allez ouste, au potager !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Vous me flattez ! Je me demande d'ailleurs pourquoi, vu qu'il y a longtemps que ma sympathie et mon estime vous sont acquises.

      Supprimer
  4. Vous savez, on ne ressemble pas forcément à son paternel, il en est qui prennent du côté de leur
    maman, comme on dit...Une supposition que Mme. votre mère ait cultivé son jardin tout en rédigeant
    son journal intime et vous trouvez là une source évidente de satisfaction filiale. Mais bon, bien sûr je
    ne fais que dans la supposition, vous pensez...
    Amitiés.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. On m'a toute mon enfance affirmé que j'étais "du côté de ma mère". En fait, je crois que je suis une combinaison assez réussie des défauts des deux. J'ai même su en développer certains à un degré inespéré (en en atténuant d'autres : on ne peut pas exceller en tout !).

      Supprimer
    2. s'il vous flatte, c'est donc qu'il m'insulte. Haro donc sur le Leon. Je propose le pal. Mais il est fichu d'aimer ça !

      Supprimer
    3. Allons, Francis, soyons grands, soyons généreux ! Plutôt que crucifier Léon, louons sa constance ! Voici bientôt trois années qu'il s'inflige le supplice de ma lecture ! N'est-ce pas admirable ?

      Supprimer
  5. Rassurez-vous, il y a bien pire que vous : je viens d'en voir deux passer en courant, en short et t-shirt, à l'instant et sous mes fenêtres. Courir, pensez-donc !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Quand je vois une si affligeante scène, je regarde toujours qui les poursuit. Et je ne vois personne...

      Supprimer
  6. Robert Marchenoir10 juillet 2014 à 19:02

    C'est émouvant, ce portrait d'un bricoleur compulsif et calamiteux. Je ne pensais pas que ce type psychologique pouvait exister. Gaston Lagaffe, peut-être ? Mais non, Gaston Lagaffe est un paresseux qui bricole pour pouvoir dormir davantage... et ses bricolages fonctionnent...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. N'exagérons rien : ses tentatives fonctionnaient plus ou moins, seulement le travail était la plupart du temps cochonné...

      Supprimer
  7. "Nier l'existence de tout "air de famille" me paraîtrait abusif", cela pourrait même paraître suspect.
    "Devrais-je en conclure que je n'ai que très peu commencé à vieillir ?" Vous pourriez aussi en conclure que vous n'êtes que très peu le fils de votre père.
    Quoiqu'il en soit, son côté : Mr. Bean fait du bricolage, est tout à fait réjouissant à lire et le rend très sympathique.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En fait, il n'était pas si sympathique que ça (sauf à la fin, après que j'eus décidé de ne plus le contrarier quoi qu'il dise ou fasse). Il avait très mauvais caractère, ne supportait pas les critiques et était persuadé d'avoir toujours raison. C'est pourquoi il persistait dans l'erreur avec une constance remarquable.

      Supprimer
  8. Mon père adorait bricoler : c'est au moins un gène qu'il m'a épargné. Mais alors là, complètement épargné.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il vous a légué celui des mots-croisés. C'est déjà pas si mal... Il a fallu que je m'inocule moi-même ce virus pour en profiter pleinement.

      Supprimer
  9. J'avais lu quelque par; "On devient quand on insulte les autres de jeunes cons"; pourquoi pas.

    Quant à ressembler à mon paternel, pourquoi pas et j'en serais très heureux, c'était un homme sage et j'en suis loin ou alors le côté belliqueux de ma mère a pris le dessus avec l'âge.

    Toujours de bien beaux textes.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. M.... , on devient vieux quand on insulte , etc...

      Supprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.