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samedi 4 octobre 2014

Les poules au père Milien



Dans le droit fil de mon billet d’hier, m’est revenu à l’esprit un autre exemple de cette franchise paysanne que j’y évoquais.

Alors que j’étais prof dans un collège rural en Indre-et-Loire, nous louâmes une petite maison au fils du père Milien qui, lors du partage de ses biens lui en avait légué deux qu’il avait retapées afin de les louer à un prix officiel ridicule auquel venait s’ajouter un substantiel supplément de la main  à la main. Milien, de son prénom complet Émilien, était un vieux grigou de quatre-vingt et quelques années qui, s’il n’avait fait son partage, aurait de loin été le plus riche du village où ses fils lui avaient succédé dans l’exploitation de la scierie familiale. Il courait sur le vieux des bruits bien malveillants : l’occupation n’aurait aucunement nui à sa prospérité, bien au contraire ; il aurait été en son temps gaillard une « fine lame » toujours prête à s’enfoncer dans toute femelle accueillante… Mais ce qui provoquait le rire des villageois, c’était sa pingrerie et les déboires qu’elle lui occasionnait parfois.

Ma jeune épouse et moi nous installâmes dans ce que nous croyions un douillet « chez nous ». Malheureusement, Milien avait tendance à continuer de s’y sentir chez lui, comme nous le constatâmes un jour qu’allant chercher des poires dans le jardin nous trouvâmes le poirier totalement dépouillé de ses fruits. Intrigué de cette étrange disparition, nous en avisâmes le vieillard qui nous déclara les avoir récoltées et nous invita dans sa munificence à ramasser celles qui, tombées au sol, n’étaient pas complètement pourries. De même il se servait en eau à notre robinet extérieur sans daigner nous en demander la permission. Son sens approximatif de la propriété l’amenait même à s’approprier l’avoine qu’un autre locataire, propriétaire de chevaux, entreposait dans un appentis adossé à son écurie  et cela dans le but louable d’en nourrir ses poules. L’éleveur s’en aperçut, et un jour qu’il venait soigner ses bêtes, il avisa la 2 CV camionnette du Milien sans que le bon vieux ne soit visible. C’est alors qu’il entendit du bruit dans sa réserve à grain. D’humeur farceuse, il repoussa le loquet extérieur et le bon Milien se trouva enfermé dans le lieu de ses rapines jusqu’à ce que ses cris alertent quelque passant qui l’en délivra. Le ridicule ne tue pas.

Or donc, Milien, ses ardeurs de jeunesse passées, s’intéressait toujours aux poules mais seulement à celles porteuses de plumes et productrices d’œufs dont il faisait commerce. Son goût pour ces volailles ne risquait pas de nous échapper, vu que la cabane en planche délabrée qui leur tenait lieu de poulailler se trouvait à quelques mètres de notre entrée. Nous avions planté des fleurs afin d’égayer les abords de la maison que ces gallinacées se mirent en devoir de détruire en grattant les plates-bandes pour y trouver pitance. Un rien agacé, je demandai à son propriétaire de fils de bien vouloir lui faire déplacer l’édicule, de m’indiquer quelles étaient les limites exactes de mon terrain et de me fournir les matériaux nécessaires à la clôture que je me chargerais d’installer. Mes requêtes furent acceptées ramenant la paix au hameau. Milien eut même la bonté de la réinstaller suffisamment près de notre clos  pour que nous continuions à jouir de sa vue.

Hélas en ce bas monde l’harmonie ne saurait durer. Son emploi à temps partiel ne l’occupant que peu, mon épouse s’ennuyait à regarder la pluie tombant sur la campagne. Naquit alors en son esprit le désir d’un compagnon à quatre pattes du genre canidé. Ne sachant rien lui refuser, je me mis en quête de l’animal convoité. Une collègue m’ayant dit que sa chienne boxer ayant, suite à une aventure avec lendemain en compagnie d’un berger allemand, récemment mis bas une portée de chiots, j’en fis part à mon épouse qui n’eut de cesse que nous en adoptions un. C’est ainsi que, venu le temps de son sevrage, ce bâtard molossoïde que nous baptisâmes Jock (du nom d’un ivrogne que nous connûmes en Écosse) entra dans notre vie et accessoirement dans celle des poules au Milien…

A suivre…

16 commentaires:

  1. Robert Marchenoir4 octobre 2014 à 15:29

    Des moutons aux chiens en passant par les poules... on finira bien par parler de koalas.

    (Private joke -- enfin pas tant que ça.)

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    1. En quelque sorte sauter du coq à l'âne !...

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    2. A la force du poignet, l'amiral est parvenu à conquérir le monopole du koala catapulté. Je ne me risquerais pas à empiéter sur son territoire.

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  2. je plussoie, comme Pangloss, la suite..........

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  3. Un billet criant de réalisme. A la suite d'un différend avec notre voisin agriculteur (j'ai oublié lequel mais ça ne devait pas être bien grave, mon père étant plus que conciliant avec les voisins), l'agriculteur en question érigea un poulailler jouxtant notre clôture; et donc, comme dirait Chirac, nous bénéficiâmes du bruit et de l'odeur.

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  4. J'oubliais: ce voisin avait un fils nommé Alphonse, qu'il appelait Le Fonse en nous expliquant que c'était moins long à dire.

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  5. "Le Fonse" ? Oh, happy days !...

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  6. Hollande, les poules ça le connait!

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  7. J'ai peine à identifier le rapport qui unit votre commentaire au sujet du billet.

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